La fable hospitalière

Monsieur L’hôpital est en service de réanimation. Les symptômes de sa maladie : déficit structurel, lits et blocs sous-utilisés. Le diagnostic après réunion de concertation pluri tutelles est clair : excès de charges, manque d’activité. Souffrant manifestement de surpoids, le patient, qui n’a pas respecté ses régimes, doit subir une opération de chirurgie bariatrique. Le chirurgien en a vu d’autres et l’attend de pied ferme avec un programme minceur de plusieurs milliards d’euros. Le patient se révolte et exhorte le médecin, plaquette de communication vengeresse à l’appui, de s’occuper plutôt de sa voisine de chambre. Madame Clinique est aussi mal en point que lui, mais à l’inverse, elle est plutôt dénutrie et mal aimée, elle souffre de douleurs cardiaques. Elle est également attendue au bloc et craint que l’anesthésiste n’essaie à nouveau de l’opérer sous hypnose. Mais elle reste optimiste, elle fait confiance à son hygiène de vie et se risque même à donner quelques conseils diététiques à son voisin. Elle lui explique que le travail c’est la santé, que l’on peut rester en forme sans se bourrer de MIGAC et qu’il faut absolument éviter les substances et autres emprunts toxiques. Elle tente même de lui transmettre son goût pour la nouveauté et son indéfectible instinct de survie. Mais rien n’y fait, il ne l’écoute pas, pense qu’il est immortel et tente même de lui chiper son plateau repas. L’opération chirurgicale rate et Monsieur L’hôpital est mis sous perfusion. Madame Clinique se dit alors qu’il faut qu’elle tienne le coup car personne ne viendra la sauver et on compte sur elle. Elle se rappelle les grands principes que la vie lui a enseignés et continue son chemin.

Ségolène Benhamou
Présidente du syndicat national FHP-MCO

L’ACTU SANTÉ

La droite du Sénat revient sur le SPH

Le texte de la loi de modernisation du système de santé sera examiné à partir du 22 juillet en commission des affaires sociales au Sénat, et seulement en septembre dans l’hémicycle. La majorité sénatoriale de droite est déterminée à revenir sur la définition du SPH. « On revient à une conception idéologique. Dans mon rapport sur l’hôpital, j’avais préconisé l’inverse, de faire signer des contrats de service public clairs quand on avait besoin d’hospitalisation privée » déclare Mr Larcher, président du Sénat. Il précise par ailleurs que l’UMP prépare un « texte alternatif » pour 2017 au cas où… Enfin, ils diront non au tiers payant. « Le tiers payant obligatoire, c’est une mesure idéologique qui met les libéraux dans une situation de tension majeure. Les médecins n’en veulent pas, on n’en veut pas, c’est non ! ». Sur ce point, des mouvements de fronde spontanés et régionaux de médecins se multiplient sur le territoire. La base prend le relai des syndicats.

Des économies pour tout le monde

« Je n’ai pas peur de dire que j’aime l’hôpital public ! (…) J’ai tourné la page de l’hôpital entreprise, degré zéro de la pensée politique, vision aussi fausse que caricaturale de ce que doit être un établissement de santé au XXIe siècle » déclarait la ministre de la santé devant des directeurs d’hôpitaux conquis aux Salons santé autonomie. L’auditoire a moins apprécié l’évocation de la circulaire budgétaire envoyée aux ARS qui détaille les économies de 730 millions attendus dans les hôpitaux pour 2015. La ministre a enfin précisé que cette décision n’entraînerait pas de plan social dans les hôpitaux et que le gouvernement demeurait attaché aux 35 heures dans les établissements publics.

62% d’interventions en ambulatoire en 2020

La DGOS a fixé un objectif de 62% des interventions chirurgicales en ambulatoire à l’horizon 2020. La cible de 50% en 2016 est atteignable selon la tutelle puisque le taux était de 44,9% en 2014, avec 53,6% pour les établissements privés et 33,5% pour les établissements publics. 2014-16 sera une phase de transition « soutenue, mais jouable où on laisse le temps aux organisations de se mettre en place » et à partir de 2017 jusqu’en 2020, il y aura un doublement du tendanciel de progression. Pour cela, un plan d’actions 2015-20 en 6 axes sera diffusé cet été aux ARS. Un minimum de 100 millions d’euros d’économies sont attendus.

Le PAERPA lance sa newsletter

Au sommaire de ce numéro 1 : « Des territoires engagés, des acteurs impliqués, pour une prise en charge des personnes agées optimisée« . Quelles actions phares et innovantes dans chacune des 9 territoires expérimentateurs ? Découvrez les témoignages de professionnels engagés dans la démarche Paerpa.

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Régions

Le Nord-pas-de-Calais lance une bataille juridique

Si les établissements de santé privés souffrent d’un manque de reconnaissance en France, ceux du Nord-pas-de-Calais doivent composer avec une région historiquement favorable au service public. « Aux réunions, j’y vais avec le casque ! »  plaisante le Dr Jean-Marc Catesson, nouveau président de la FHP Nord-pas-de-Calais. « Pour bien comprendre, nous sommes en tout  51 établissements privés et nous devons déjà composer avec 38 CH, qu’aucun DGARS n’a eu le courage de restructurer jusqu’à présent« . Le secteur privé perçoit 0,4% des MIGAC et 4% des FIR dont 70% concernent les médecins libéraux. Le conseil régional, pour sa part, s’est fendu récemment d’un courrier stipulant qu’aucune subvention ne serait versée à des établissements de santé dont les praticiens pratiquent des dépassements d’honoraires, ni à des GCS sauf si le secteur public était largement majoritaire.
La FHP Picardie, à l’initiative de son président Vincent Vesselle décidait déjà en 2014 de se lancer dans des procédures contentieuses à l’encontre de décisions de l’ARS.
« Je suis un homme de consensus, élu sans doute aussi pour ma tempérance, bref, j’apprécie le dialogue et la négociation. Mais lorsque nous exposons nos problématiques, que personne ne nous répond et qu’on donne systématiquement, et parfois en dépit des règlementations, au secteur public, il faut agir« . Le CA de la FHP Nord-pas-de-Calais décidait en avril 2015 d’entrer aussi dans la bataille juridique. « C’est une décision difficile que nous avons prise lorsque tous les autres recours ont été épuisés » déplore le Dr Catesson.
La FHP régionale attaque 7 décisions d’autorisation en cancérologie données à l’hôpital alors même qu’il ne répond pas aux seuils règlementaires. Elle participe de plus à l’opération des 1000 recours pilotée par la FHP-MCO qui s’est emparée d’un dossier concernant les 31 allocations DAF et AC données arbitrairement par l’ARS pour un montant de 15 millions d’euros aux hôpitaux publics.  » Quand nous avons lu les libellés de ces enveloppes ‘aides à la trésorerie’, ‘aides à la réduction du déficit’, etc. nous avons décidé d’y aller car, quand nos cliniques privées sont durablement en déficit, c’est le tribunal de commerce qui s’occupe d’elles, et rarement en les renflouant, contrairement aux hôpitaux qui, eux, peuvent compter sur les ARS pour les remettre à flot. Nous prenons notre part du travail en région mais le relai de la FHP-MCO nous aide dans ce travail juridique « .

En région Nord-pas-de-Calais, les voyants de santé publique sont au rouge. « Nous avons un très bon réseau de médecine de ville. Nous participons activement au dépistage, à l’éducation thérapeutique. Pour le reste, nous faisons au mieux avec les autorisations que l’on nous donne, comme celles de 3 services d’urgence privés quand le secteur public en dispose de 30 ! ».

La région en chiffre : 51 cliniques et hôpitaux privés, 23% des capacités en lits et places, un tiers de part de marché en MCO, 53% de la chirurgie, 48% de la chirurgie des cancers, 40% de la chimiothérapie et 70% de la radiothérapie et curiethérapie.